M’affranchir

Les journée se suivent et ne se ressemblent pas.

Hier, je sauvais un ado raton laveur qui était prisonnier de ma poubelle extérieure. Aujourd’hui, en mettant les pieds au plancher, c’est une pluie de… pipi qui m’ancre dans le réveil.

J’ai tout de suite pensé que c’était un des bouchons d’une vessie externe qui était mal fermé. Et bien non. Ce n’est pas ça.

Les yeux engourdis mais tout de même dédiés à repérer le souci du moment, je repère finalement le foutu problème: Il y a un mini trou dans le sac! 

Mini trou mais grosse merde à gérer! Il manquait juste ça à mon éventail de malencontreuses circonstances avec ces guirlandes! Je n’ai pas assez d’être incontinente, là c’est un sac qui l’est aussi! Charmant!! Vraiment.

Dans 2 heures, j’ai une rencontre extérieure avec une cliente. Quel timing impeccable. Pure joie.

J’attends que 8h00 s’amène pour appeler le CLSC, mon espoir unique.

Je leur explique la situation et demande de me préparer un sac de rechange que je vais passer prendre dans moins de 30 minutes top chrono. On me demande mon nom et ma date de naissance, ce que je partage volontier. Le décompte est bon. Ils acceptent et j’en suis TRÈS reconnaissante.

J’embarque dans mon auto levée-portée et je pars récupérer le sac continent.

Arrivée à la réception, il y a bel et bien un emballage identifié à mon nom qui m’est remis. Je suis touchée et très enchantée de leur collaboration.

Je reprends la route vers chez-moi, pressée d’aller m’étancher la fuite. Ma mésaventure achève. J’arrive même à trouver tout cet épisode sympathique tellement tout s’enchaine parfaitement.

Arrivée à la maison, je déballe la chose et constate que le sac est différent. Je me dis que c’est probablement un nouveau fournisseur comme ça  m’est déjà arrivé.

Je vois le tuyau. Cibole!! Après ça, c’est la hausse de jardin! Il est beaucoup plus gros que de celui que je porte!

BANGGGG! Coup de cauchemar: on ne m’a pas donné la bonne affaire! Kâl… de tab…. Tic tac tic tac… Mon deadline de rendez-vous à venir approche et je n’ai pas ce qu’il faut pour régler la fuite! Épisode sympathique oui….

Je me garoche sur mon cellulaire pour rappeler le CLSC. Il y a encore de l’espoir: je vais apporter mes choses pour ma rencontre et me rendre là-bas après être retournée au CLSC. Ça se peut encore.

Je réussis à avoir la ligne après une loooongue patience. 

C’est la même jeune femme qui me répond. Je lui explique rapidement la situation. Elle se confond en excuses et moi je me dis silencieusement sur un ton de sarcasme acéré: à quoi ça a servi que tu me demande mon nom et ma date de naissance déjà? Après plus de 3 ans à me présenter là 1 à 2 fois par semaine, on sait toujours pas quelle est ma condition? Ça défrise l’humilité assez efficacement disons.

Là, elle me demande d’attendre quelques instants – ben oui, j’ai du temps en masse moi là – parce qu’on lui transmet de l’information. Tic tac tic tac…

Lorsqu’elle me revient, c’est pour me dire qu’ils ne peuvent pas me remettre le sac. Je dois voir une infirmière pour que le changement soit fait de façon aseptisée pour éviter les risques d’infection. Et comble de perfection pour cet « épisode sympathique »: il n’y a pas de place avant cet après-midi!

Là, les rouages de mon cerveau me présentent instantanément le topo: je vais devoir aller rencontrer ma cliente avec un sac qui fuit!

J’essaie de garder mon calme qui a tôt fait de partir en cavale. Ma voix tremble. Je ressens un volcan de colère viscérale qui m’explose en plein ventre.

En plus d’avoir eu à faire un aller-retour bredouille, là on me dit que la gestion des microbes potentiels est plus importante que ma situation. On me dit que les risques d’infection sont trop grand pour que je me change le sac toute seule MAIS avoir le rein connecté à un sac percé, ça, ça pause pas de risque?

J’insiste pour pouvoir passer avant mon rendez-vous avec ma cliente. Rien à faire: il n’y a pas de place en avant-midi.

Voilà que tous les orifices de mon corps laisse s’échapper une boucane toxique. 

Je le sais pertinemment bien que ne n’est pas de SA faute, mais j’ai juste envie de l’envoyer CHIER. Je suis coincé en plein délire: « Toi, la patiente impatiente, on s’en fout de la situation de MERDE dans laquelle tu te trouves. Nous, on applique des règles. Point. »

En tentant de m’auto-contenir et de dire ce que j’ai à dire malgré ma voix qui casse, j’articule: « Ça va aller, un rendez-vous, j’en ai un vendredi. Je viendrais là. »

On est mercredi.

C’est pas juste la procédure de changement de sac qui doit être aseptisée. leur humanité aussi.

Elle complète l’échange en me souhaitant une bonne journée. UNE BONNE JOURNÉE! C’est tellement certain qu’elle va être bonne ma journée, à être constamment sur mes gardes craignant les fuites de mon sac aseptisée en circuit fermé pour prévenir les infections!

Seule devant cette journée à venir, complètement envahie par la colère et la révolte d’être soumise à des règles bêtes, sans aucun justement, piégée dans des circonstances qui auraient pu être complètement différentes, voire anodines, si seulement quelqu’un quelque part avait sorti de sa zone figée, neutre, anonyme et lâche avec un peu de simple gros bon sens et je faire confiance qu’après plus de 3 ans à les gérer ces sacs-là, j’étais pleinement en mesure de procéder à ce changement moi-même!

Et comme une décharge d’implosion sourde et rebelle, une évidence me nolise la conscience:  si je reste figée dans leur cadre, je fais y aller ma santé mentale et ma propre dignité. J’étouffe. Littérallement.

Ce système de santé est plus malade que moi. Je peux laisser cette séquence d’événements scrapper ma journée ou je peux choisir de rapatrier mon pouvoir comme je peux. Sur-le-champ. 

Idée #1

Je vais changer les sacs de côté. Je vais mettre le percé du côté où il y a moins d’urine qui est collectée. Ça va amoindrir les risques. 

Je m’exécute et je sens mon énergie se calmer et se transformer en gros pied de  nez à cette situation et à celles qui y ont contribué.

Idée #2

Je ne vais PLUS JAMAIS me retrouver dans cette situation-là. Amazon se fend le cul pour en vendre des sacs de même. Je vais m’en commander. Je n’aurai pas à quémander de l’aide si ça m’arrive encore.

Ce recadrage a été très efficace. Salutaire. Beaucoup plus constructif que de me ruminer – et me ruiner – la colère et la rencoeur toute la journée.

Le système de la santé ET ses composantes visent d’abord et avant tout la dépendance. J’oserais même l’asservissement. Je choisis expressément et délibérément de m’extraire de la zone de victime des circonstances dans laquelle je me suis retrouvée ce matin. 

Je ne vais pas me contenter de subir leurs lourdeurs et leurs incohérences. Je vais faire mes choix et vivre DIGNEMENT. FIÈREMENT.

Guérir, ça signifie aussi prendre ses responsabilités et faire ce qu’on a à faire parce que c’est la bonne chose pour soi.

M